Rédacteur : Philippe Silberzahn
Raison #1 « L’IA va massivement supprimer des emplois ». Derrière cette raison il y a la vieille crainte que l’automatisation supprime des emplois. Or ce n’est pas ce qu’on constate historiquement. L’automatisation augmente la productivité, ce qui abaisse les coûts et permet de développer le marché, ce qui, en retour alimente la croissance et le besoin en emplois.
Raison #2 « L’IA va remplacer les humains. » L’IA est un outil puissant qui ne fonctionne que s’il est bien utilisé. Depuis toujours, l’être humain a utilisé la technologie pour faire mieux certaines choses (productivité) et pour pouvoir faire des choses nouvelles (innovation). L’IA ne remplacera pas les humains, elle trouvera son plein potentiel dans la façon dont les humains l’utiliseront. Ceux qui gagneront seront ceux qui apprendront à bien utiliser l’IA comme ceux qui ont gagné dans le passé étaient ceux qui ont maîtrisé le feu et la fabrication de flèches.
Raison #3 « Avec l’IA, les moins qualifiés seront largués. » Bien au contraire, l’IA est la chance des moins qualifiés. Elle permet par exemple à ceux qui n’ont pas pu apprendre de langue étrangère de se débrouiller malgré cela grâce à un traducteur automatique. Elle est le grand facteur de remise à niveau de ceux qui n’ont pas pu faire d’études. L’IA, c’est 150 ans d’études dans votre poche.
Raison #4 « L’IA ça n’est qu’une techno. » Sous-entendu, cela ne concerne pas la direction générale qui ne s’abaisse pas à parler cuisine. Grosse erreur. L’IA, bien-sûr, est une technologie, mais ce serait une erreur de la mettre simplement au service de ce qui existe déjà pour l’améliorer. La bonne approche est de repenser entièrement son métier, ou son activité, à partir de l’IA. Comme la presse il y a vingt ans qui s’est demandée: “C’est quoi être un journal à l’heure d’Internet quand on peut trouver l’info gratuitement sur Google?” L’IA, c’est une techno, certes, mais d’importance stratégique.
Raison #5 « L’IA n’est pas au point, il vaut mieux attendre… » Aucune techno n’est jamais au point. On n’a jamais attendu qu’aucune le soit pour l’utiliser. L’automobile a mis des années avant qu’elle soit à peu près utilisable par le commun des mortels. Pourtant cela n’a pas empêché qu’elle soit utilisée avec un très gros impact. Si vous attendez que l’IA soit “au point”, à supposer que soit définissable, il sera trop tard quand vous vous y mettrez.
Raison #6 « On ne sait pas comment l’IA fonctionne vraiment, donc c’est dangereux. » C’est quelque chose qu’on entend beaucoup, notamment des professeurs de morale, qui supposent qu’on ne peut utiliser quelque chose que si on le comprend parfaitement. Mais c’est faux. La plupart des innovations humaines ont été intuitives, et on n’a souvent compris comment elles marchaient que bien plus tard. Sait-on parfaitement comment fonctionne un juge d’instruction ou un comptable? Non. Et pourtant ils sont très utiles. Lady Montaigu a diffusé la pratique de la variolisation au début du XVIIIe siècle, ancêtre de nos vaccins. Elle ne savait pas expliquer comment ça marchait, mais ça marchait et c’est ce qui comptait.
Raison #7 « L’IA je n’y comprends rien, je vais attendre que les choses s’éclaircissent… » Ici l’erreur est de penser qu’on ne peut comprendre quelque chose que lorsque tout devient clair. Or pour quelque chose d’aussi complexe que l’IA (qui est un champ d’innovations multiples à lui tout seul), ce ne sera jamais le cas. La seule façon de se faire une idée de ce qu’est l’IA, c’est de pratiquer. Et pratiquer ça ne veut pas dire poser une question à ChatGPT et raconter le résultat à ses voisins. Pratiquer, ça veut dire investir du temps pour s’exercer sur des cas réels, et ainsi pouvoir mesurer les forces et les faiblesses de la technologie. Cela permet aussi de mieux imaginer les possibilités (cf Raison #4).